L’US Open, machine à cash

L’US Open, machine à cash

21 août 2019 Non Par SoTennis

Prize money stratosphérique, court Central gigantesque, partenariats commerciaux lucratifs, droits TV colossaux… L’US Open, dernière levée du Grand Chelem de l’année, où se mêlent bruit, spectacle et lumière, cultive sa singularité au rythme du profit.

En 1978, l’US Open se met au dur. Alors qu’il se déroulait auparavant sur terre battue, à Forest Hills, le tournoi profite de son déménagement à Flushing Meadows, pour changer de surface et d’ambiance. Depuis, la dernière levée du Grand Chelem de l’année, où se mêlent bruit, spectacle et lumière, n’a pas cessé de se démarquer, sur ses 18,8 ha. L’Arthur-Ashe Stadium (inauguré en 1997), doté depuis 2016 d’un toit rétractable (de 6 500 tonnes qui se déploient en moins de 7 minutes), après moins de deux ans de travaux, revêtu du logo d’un de ses « partenaires » JP Morgane Chase, peut accueillir 23 771 spectateurs, soit le plus vaste court Central au monde, théâtre en juillet dernier du Fortnite World Cup (compétition de esport). « L’idée d’avoir un toit au-dessus de l’Arthur-Arshe Stadium ne date pas d’hier, nous glisse David Brewer, directeur du tournoi de l’US Open. Il y a huit ans, lorsqu’une nouvelle finale du simple Messieurs a eu lieu le lundi, à cause de la pluie, tout s’est accéléré. Le besoin de construire un toit rétractable sur le court Central était alors devenu incontournable. Nous avons alors commencé à chercher des solutions. Au départ, nous nous sommes heurtés sur le fait que l’architecture de l’édifice ne permettait pas un tel projet. Nous avons finalement trouvé une solution (NDLR : avec le cabinet Rossetti). » Sept ans plus tard et 600 millions de dollars (plus de 540 millions d’euros) investis et quasi entièrement financés par la Fédération américaine de tennis (USTA), l’USTA Billie Jean King National tennis Center – appellation officielle et siège de l’US Open, est entré dans une nouvelle ère. En plus d’un toit rétractable sur l’Arthur-Ashe Stadium, un tout nouveau court Louis-Armstong, équipé également d’un toit rétractable et d’une capacité de 14 069 places, a été inauguré en 2018, sans oublier le nouveau Grandstand, circulaire, en service depuis 2016, passant de 6 000 à 8 000 sièges. En 2014, les courts 4, 5, 6, dont les sièges et le sens de circulation ont été modifiés, avaient été rénovés, offrant ainsi aux spectateurs la possibilité de regarder, de manière simultanée, les joueurs évoluant sur ces trois terrains d’entraînement. Au total, ce n’est pas moins de sept courts sur 16 qui ont été déplacés afin de créer, là aussi, un espace plus important pour le public. Au-delà du confort de ses hôtes, les organisateurs, loin d’être des philanthropes, ont tablé sur 100 000 entrées supplémentaires, pour un événement qui compte régulièrement plus de 700 000 visiteurs sur la quinzaine – avec une pointe à 732 663 tickets vendus en 2018 – souhaitant atteindre et dépasser la barre des 800 000 visites à court terme, devenant par conséquent le Grand Chelem le plus fréquenté. Une croissance qui a comme principale aspiration l’augmentation des recettes de la billetterie et d’accroître le chiffre d’affaires du Grand Chelem new-yorkais, qui s’élevait à 301 millions d’euros en 2017. En plus de ses aménagements importants côtés courts, l’US Open en a également profité, à l’occasion de ce plan de modernisation, pour doubler ses espaces de vente, de restauration – restant ouverts très tard – et ses salons de relations publiques, histoire d’amasser un peu plus de cash.

Money, money, money

Diffusé dans plus de 200 pays, l’US Open a pu s’appuyer, entre autres, sur ses revenus émanant des droits TV pour assurer la pérennité de son business model. La surpuissante ESPN a négocié la diffusion exclusive du dernier Grand Chelem de l’année et les Open Series pour un montant de 70 millions de dollars (63 millions d’euros) par an. Ce nouveau partenariat rapportera la coquette somme de 825 millions de dollars (743 millions), aux organisateurs, pour la période 2015-2026. De quoi proposer aux joueurs une dotation-record. En 2019, le prize money s’élève à 57 millions de dollars (plus de 51 millions d’euros. 3,85 millions de dollars pour le vainqueur, plus de 3 millions d’euros et 1,9 million de dollars, plus de 1,7 million d’euros pour le finaliste). Jamais, auparavant, une telle dotation d’un tournoi du Grand Chelem n’avait été aussi élevée. Au-delà des droits TV, l’US Open peut également compter sur ses sponsors pour garantir une trésorerie bien garnie. Parmi eux, Emirates, présent depuis 2012, Lavazza, depuis 2015, Mercedes depuis 2009, sans oublier les incontournables IBM, Americain Express, Wilson, (fournisseur depuis 1978), Polo Ralph Lauren, Evian et JP Morgan Chase qui lâche depuis 2007 un chèque de 15 millions de dollars par an (plus de 13 millions d’euros). En plus de ces derniers, l’US Open, qui a opté pour une stratégie de diversification, compte également dans ses rangs la bière hollandaise Heineken ou encore la vodka française Grey Goose. « Je ne pourrais imaginer meilleur partenariat sportif que l’US Open, abonde Marco Lavazza, vice-président de la marque de café éponyme. Ce partenariat colle parfaitement à notre stratégie marketing en Amérique du Nord tant pour notre positionnement de marque qu’en termes démographiques. New York est au cœur de notre stratégie de développement aux États-Unis. » Une stratégie de diversification que l’US Open souhaite également mener concernant son public. Une étude réalisée durant le tournoi 2014 a pointé du doigt un manque de diversité. En 2015, l’USTA lançait une campagne d’e-repuration faisant appel à des influenceurs, en particulier dans la communauté hispanique et afro-américaine, afin de mieux faire connaître le tournoi. Un choix qui a permis d’observer, la même année, un doublement du nombre des Afro-américains dans les allées de l’US Open où se mêlent bruit, odeur de frite et spectacle. Un triptyque encore plus palpable lors des fameuses « night sessions », se jouant, très souvent, devant un large public, différent de celui de la journée, endimanché, prêt à débourser de folles sommes pour regarder jouer Roger Federer et compagnie et où sur les écrans du stade défilent les messages publicitaires au changement de côté, sur fond de musique pop. C’est aussi l’une des marques de fabrique, qui rapporte, de l’US Open. « La marque de fabrique de tous les Grands chelems vient tout d’abord de la ville dans laquelle ils se déroulent, dixit David Brewer, directeur du tournoi de l’US Open. À New York, l’ambiance reste spéciale surtout lors des sessions de nuit dont nous avons été les premiers à les organiser. Malgré tout, je pense qu’il y a encore une réelle différence entre les quatre majeurs. Cette différence est désormais encore plus visible avec nos nouvelles installations. » À l’image de Big Apple, l’US Open ne s’endort jamais. La dernière levée du Grand Chelem de l’année a parfaitement négocié sa mutation et assure, aujourd’hui, son retour sur investissement.

E-A