Mona Barthel : « Je me suis remise à vivre »

9 août 2017 Non Par SoTennis

Après avoir contracté l’an dernier un virus, lui causant de graves inflammations musculaires et impactant son système nerveux, Mona Barthel a retrouvé depuis sa place au sein du circuit WTA et le chemin de la victoire. Pour y parvenir, l’Allemande a fait preuve de patience et d’abnégation. Celle qui s’était imposée à l’Open GDF SUEZ en 2013, évoque, sans misérabilisme, ce traumatisant épisode et sa « nouvelle » philosophie de vie.

Mona Barthel lors de Roland-Garros 2017 / ©GettyImages

Mona Barthel lors de Roland-Garros 2017 / ©GettyImages

L’an dernier fut une année délicate pour vous (elle n’a pas joué pendant des semaines à cause d’un virus lui causant de graves inflammations musculaires). Quel a été votre état d’esprit durant cette période? 
Tout d’abord, ce fut une période difficile, car on ne savait pas ce que j’avais. Au tout début, je ne savais même pas si j’allais rejouer encore au tennis. Je n’avais aucune réponse, je ne savais vraiment pas quoi faire. Lorsque j’ai commencé à me sentir mieux, je me suis remise à vivre. Ce fut une étape importante pour être de retour sur le court. Par la suite, j’étais très heureuse d’y être à nouveau et de commencer tout doucement mes entraînements. Ce fut très lent, car il y avait des jours où tout était bien, puis quelques jours plus tard, j’étais extrêmement fatiguée. C’est un sentiment difficile de ne pas être à 100 % de ses capacités. Au mois de décembre 2016, j’ai commencé à réellement me sentir mieux et à bien jouer à l’entraînement.

En mai dernier, vous avez remporté le tournoi de Prague. Qu’a représenté ce titre ?
Après une année 2016 très dure sur le plan physique, remporter ce titre fut très spécial. C’était un tournoi relevé avec de bonnes joueuses. J’avais disputé les qualifications en sauvant trois balles de match au deuxième tour. En tout, j’avais joué 13 matches de suite. Ce furent une belle semaine et une bonne période. Cela m’a pris du temps pour revenir, pour retrouver une condition physique et pour me sentir bien sur le court. Aussi, grâce à mes victoires, j’ai amélioré mon classement. En janvier dernier, j’étais au-delà de la 190e place mondiale, désormais, j’ai retrouvé le Top 50 (49e mondiale au 07-08-2017).

Désormais, avez-vous une autre approche de la compétition, de la vie sur le circuit WTA ?
Bien sûr, car durant cette période, différentes possibilités se sont offertes à moi. Arrêter, continuer… Depuis mon retour à la compétition, bien entendu que j’ai toujours envie de gagner tous mes matches, lorsque ce n’est pas le cas il y a de la déception, mais d’un autre côté, j’arrive à mieux relativiser. Je suis chanceuse d’être à nouveau sur le circuit et de faire ce que j’aime.

« C’est une vie où les victoires et les défaites rythment tout »

Il y a quelques années vous avez dû faire face à différents commentaires peu élogieux concernant votre aspect physique (en particulier son acné). Comment avez-vous pris ces remarques ?
Cela m’importe peu. C’est le cas aujourd’hui, comme c’était le cas hier. Il est certain qu’actuellement avec les réseaux sociaux, il est plus simple que ces commentaires viennent à vous. Mais ce sont des commentaires provenant de personnes que je ne connais pas. Cela ne me touche pas. Bien sûr, si c’était une personne de mon entourage qui me disait cela en face-à-face, cela serait différent. Je pense avoir suffisamment de distance entre tout cela. Chaque jour, j’essaie d’être la meilleure personne que je puisse être et je me concentre là-dessus. Évidemment, ce n’est jamais agréable de lire de temps en temps des choses pas sympas sur vous, mais je suppose que cela fait partie de cette vie, de ce travail.

Cela fait déjà quelques années que vous évoluez sur le circuit WTA. Quel est votre point de vue concernant cette vie-là ?
Tout d’abord, cela a toujours été un rêve d’être une joueuse de tennis professionnelle. Lorsque j’étais enfant, il n’y avait aucune autre profession que je souhaitais exercer hormis joueuse de tennis chez les pros. C’était mon rêve. Je suis chanceuse d’être parvenue à réaliser ce rêve avec le soutien de mes proches et de tant de personnes. C’est une vie où les victoires et les défaites rythment tout. Avec de grands moments de joie et de tristesse. Une vie avec beaucoup de voyages qui sont plus simples à réaliser après des victoires (sourire). D’ailleurs, j’adore voyager et découvrir de nouveaux endroits. Mais il y a également l’éloignement avec ses proches à gérer, c’est délicat. C’est une vie qui vous pousse aussi à vous motiver et à vous améliorer. Cette vie, je l’apprécie. J’ai grandi sur ce circuit où j’ai beaucoup appris sur moi-même, sur ma résistance et sur les relations avec les autres. Sans le tennis, je n’aurais sans doute pas appris tout cela.

Lorsque vous étiez enfant Steffi Graf était votre idole. Avez-vous eu l’opportunité de la rencontrer ? 
Je n’ai jamais eu, jusqu’à présent, la chance de la rencontrer. J’ai commencé le tennis très jeune (NDLR : à l’âge de trois ans), à ce moment-là, le tennis était très populaire en Allemagne, notamment grâce aux résultats de Steffi Graf. J’avais la même raquette qu’elle, les mêmes tenues… Lorsque quelqu’un me demandait, quel était mon prénom, je répondais Steffi (rires). C’était vraiment mon idole.

« Nous sommes très chanceuses d’avoir eu de grandes joueuses qui se sont battues pour nos droits »

Sur le circuit ATP, il y a beaucoup d’anciens champions qui sont désormais des entraîneurs. Que pensez-vous du fait qu’il en soit de même un jour sur le circuit WTA ?
Je pense que lorsque vous avez une famille, c’est difficile d’avoir ce rôle et de voyager autant à nouveau. Lorsque vous avez des légendes du jeu près de vous, je pense qu’elles peuvent vraiment vous aider à mieux appréhender la manière de jouer sur les grands courts, les émotions, les matches importants, les victoires les défaites… Cela dépend de ce que vous souhaitez faire et ce que vous imaginez pouvoir faire. Ce serait incroyable de revoir des championnes comme Steffi être coach.

Aujourd’hui, quel rôle à votre mère auprès de vous ? Est-elle votre entraîneur ? 
Pas vraiment. En réalité, elle voyage avec moi et me soutient au quotidien. Même si elle est sur le court avec moi lors des entraînements, je ne peux pas dire qu’elle est mon principal entraîneur. En ce qui concerne l’entraînement, je voyage avec Christopher Kas depuis Wimbledon 2016. Nous travaillons bien ensemble, tout se passe bien. L’an dernier a été une année difficile pour lui, car je suis restée loin des courts pendant un moment.

La parité des dotations est régulièrement remise en cause, notamment par quelques hommes. Une parité acquise grâce à vos aînées. D’après vous, les joueuses actuelles du circuit WTA doivent-elles être féministes ?
C’est une question difficile. Tout d’abord, je pense que nous sommes très chanceuses d’avoir eu de grandes joueuses qui se sont battues pour les droits que nous avons aujourd’hui. Je pense que cette parité est un bon message envoyé à la société. Je comprends que des personnes réclament que nous jouions aussi potentiellement en cinq sets en Grand Chelem. Je n’y suis pas opposée. Mais c’est quelque chose de différent. L’égalité des dotations, elle est présente en Grand Chelem… Encore une fois, cette parité est surtout un bon message envoyé à la société, que les femmes et les hommes peuvent être payés de la même façon pour ce qu’ils font. Nous devons veiller à ce que cela soit encore le cas à l’avenir.

Après votre carrière, envisagez-vous de tenir un rôle au sein de l’ITF ou de la WTA, pour défendre entre autres cette parité ?
C’est délicat de se projeter comme cela. On ne sait jamais de quoi demain sera fait. Néanmoins, je ne me vois pas vraiment rester dans le monde du tennis, mais qui sait. Le tennis serait une option bien sûr. Actuellement, ce sujet n’est pas ma priorité. On verra, il ne faut jamais dire jamais (rires).

Propos recueillis par E-A à Wimbledon.