Rafael Nadal: «Le plus inattendu»

Rafael Nadal: «Le plus inattendu»

30 janvier 2022 Non Par SoTennis

Rafael Nadal remporte l’Open d’Australie. Dimanche, en finale, l’Espagnol, mené deux sets à zéro est parvenu à renverser le Russe Danill Medvedev, n°2 mondial, en cinq sets (2-6, 6-7, 6-4, 6-4, 7-5 en 5 h 24 minutes). Le Majorquin s’adjuge un 21e titre du Grand Chelem. Un record.

Pour commencer, cette victoire, alors que vous étiez mené 6-2, 7-6, 3-2 et 0-40 sur votre service, est-ce que ça dépasse tout en termes de retour au score ?

Si on met tous les éléments dans la balance, le scénario, le moment, la signification, alors oui, sans aucun doute, c’est le plus grand come-back de ma carrière.

Comment pouvez-vous expliquer le fait d’avoir fait tourner ce match ?

Je ne sais pas. La situation était critique, mais le sport est imprévisible, n’est-ce pas ? Il aurait été normal que je perde en trois sets secs, mais en même temps, j’avais eu une grande occasion au deuxième set. Pendant le match, je me répétais sans arrêt que j’avais souvent eu de grosses occasions ici, à Melbourne, que parfois j’avais été malheureux mais je voulais vraiment y croire jusqu’à la fin, me donner une chance. J’ai continué à me battre et à y croire. Bien sûr j’ai été chanceux de m’en sortir à ce moment-là, mais ce soir (dimanche), c’était pour moi. Cette soirée restera inoubliable.

Vous êtes désormais le seul joueur avec 21 titres du Grand Chelem. Les chiffres disent que vous êtes le plus grand joueur de tous les temps. Quel est votre sentiment par rapport à cela ?

Honnêtement, je n’ai pas changé de point de vue là-dessus. Pour moi, c’est fantastique de remporter un titre du Grand Chelem supplémentaire à ce moment de ma carrière. Et bien sûr, 21 est un nombre spécial. Je ne dirai jamais que je le mérite, parce que beaucoup de personnes méritent, dans ce cas. Je me suis vraiment beaucoup battu pour essayer de revenir sur le court. Il y a eu des moments très durs, des conversations tendues, de celles qu’on peut avoir quand on n’est pas sûr d’avoir un jour l’occasion de retrouver le circuit. Mais je me fiche un peu de savoir si je suis le meilleur, ou un des meilleurs de l’histoire. Pour moi, il s’agit surtout de profiter de nuits comme celle-ci. Avoir réussi à conquérir mon second Open d’Australie signifie plus que tout, là, maintenant.

Vous venez d’accomplir le plus grand exploit de votre carrière ?

En tout cas le plus inattendu (sourire), sans aucun doute. Et le plus étonnant pour tout le monde, je pense. Ça a été un moment très émouvant, et je suis détruit physiquement, je ne me souviens pas de beaucoup de moments de ce match. Je sais juste que le public a été formidable avec moi.

En un mois, votre confiance en vos réserves physiques a dû prendre un coup de boost fantastique, non ?

Tout ce qui s’est passé est fantastique et c’est évident que j’ai davantage confiance dans mes chances de pouvoir continuer à profiter de ce magnifique sport. C’est ce qui me rend le plus heureux, professionnellement. Oui, je me dis que j’ai des chances de pouvoir continuer à jouer un bon bout de temps.

Vous avez paru aussi heureux que si c’était votre tout premier titre du Grand Chelem. Est-ce le cas ?

C’était plus d’émotion que pour mon premier titre du Grand Chelem, aucun doute. Je pense que sur la fin de votre carrière, vous êtes capable d’apprécier davantage ces moments parce que vous savez que les occasions se raréfient. À dix-neuf ans (l’âge de son premier titre, à Roland-Garros en 2005), oui, c’est spécial, mais vous savez que si vous continuez à bien jouer vous aurez d’autres chances. Désormais, vous ne savez jamais ce qui vous attend. Je suis fier et la satisfaction personnelle est plus élevée qu’il y a quelques saisons.

C’était quoi, le plus dur, durant ces longues semaines d’avant ce mois de janvier 2022 ?

Quand vous vous donnez une entorse à la cheville ou vous brisez le poignet, il y a un calendrier précis de réhabilitation. C’est plus facile à accepter. J’ai connu ce genre de process au cours de ma carrière. Vous savez que vous en prenez pour quatre mois et vous avez un programme à suivre. Chaque semaine, vous observez les progrès. Mais là c’était complètement différent. On essayait des trucs et pendant longtemps rien ne fonctionnait. Aucun succès. À mon âge, forcément, il y a des doutes. Savoir que vous avez une blessure dont vous ne pouvez pas guérir, mentalement, c’est plus dur. Parfois, ça vous brise le coeur. J’ai eu la chance d’avoir une super équipe autour de moi, qui m’a tout le temps soutenu. Ils ont été des amis, davantage qu’une équipe. Sans eux, sans ma famille, je ne serais pas là, devant vous.

Propos recueillis par E-A