Roland-Garros monte le son

16 mai 2016 Non Par SoTennis

Depuis 2014, le tournoi de Roland-Garros s’est doté d’une identité sonore qui lui est propre. Véritable hymne au jeu, c’est désormais ainsi que le « French Open » communique dans ses différentes prises de parole, et reste jusqu’à ce jour, le seul Majeur à bénéficier d’un tel dispositif. Laurent Cochini, Directeur Conseil de Sixième Son, l’agence qui a créé cette identité sonore, évoque avec passion la genèse de ce projet et les différentes étapes de création.

Roland-Garros possède désormais son identité sonore. / ©SoTennis

Roland-Garros possède désormais son identité sonore. / ©SoTennis

Pour un événement sportif en quoi consiste le fait d’avoir une identité sonore?
La volonté de la Fédération française de tennis était d’utiliser la musique comme un outil sur mesure, pour l’ensemble de ses prises de parole et de disposer d’un vocabulaire musical qu’il lui soit propre et exclusif. Grâce à cette musique, l’habillage sonore de tous les moments qui concernent le tournoi de Roland-Garros, sur tous les supports, est à l’image de « Roland ».

Comment cette collaboration avec Roland-Garros et Sixième Son est-elle naît?
C’est une histoire de rencontre. J’ai toujours rêvé de travailler pour une marque comme Roland-Garros et que l’agence crée l’identité sonore d’un événement sportif comme celui-là. Au sein de l’agence Sixième Son, nous en parlions beaucoup, et par le « hasard » des rencontres nous avons été amenés à nous rencontrer avec la FFT, qui elle réfléchissait à disposer d’un outil sur-mesure en matière d’identité sonore. L’agence étant leader européen dans ce domaine, nous nous sommes rapidement entendus sur quel vocabulaire choisir, comment le créer et comment le mettre à disposition des équipes de Roland-Garros.

Quelles ont été les étapes pour créer cette identité sonore?
Nous avons eu des échanges très constructifs avec la FFT, à propos de l’identité du tournoi, ce qui le différencie dans le monde du sport et du tennis. Avec les équipes de l’agence et celles de la Fédération de tennis, en particulier celle de Sophie Alexandre (ndlr : Directrice Marketing Communication de la FFT). Par la suite, de notre côté, nous avons étudié ce qui se fait dans le monde du sport et du tennis en particulier, afin de créer une différence d’un point de vue musical. Ensuite l’étape de création a été mise en œuvre, car chez Sixième Son tout se que nous faisons est de la création. Nous avons donc créé cette identité sonore, jusqu’à qu’elle soit validée par la direction générale de la FFT.

«Roland-Garros c’est la France, c’est Paris, cette dimension est également présente dans l’identité sonore du tournoi»

Quelles ont été vos sources d’inspiration pour créer l’identité sonore de Roland-Garros?
Dans ce cas, il y a eu près de 6 éléments structurants dans qui est le tournoi de Roland-Garros. Tout d’abord, il est le seul Majeur qui est latin. Pour nous cet aspect-là était fondamental. Ce que nous retrouvons dans cette identité sonore grâce notamment à un bandonéon (ndlr : instrument de musique à vent et à clavier très utilisé pour les musiques de tango) qui est l’un des instruments principaux. Cette référence latine est présente par ce biais. Ensuite, le tennis reste un sport où les courses ne sont pas nécessairement comme les autres, il y a souvent, dans les mouvements, un côté qui ressemble à la danse.
Nous avons donc lié cette dimension latine avec la danse, c’est pour cela que c’est l’instrument du tango, le bandonéon, qui a été au cœur de la création. Roland-Garros reste le tournoi du printemps pour les joueurs, nous l’avons appris grâce à nos échanges que nous avons pu avoir avec la FFT. Du coup la dimension lumière était aussi fondamentale. Ensuite, cet événement offre une dimension « Peplum » que nous souhaitions retrouver dans l’identité sonore. La terre battue nous a inspiré. L’idée était que la façon que nous jouions les instruments soit très organiques. Nous avons donc de vrais instruments, réellement joués. Enfin Roland-Garros c’est la France, c’est Paris, cette dimension est également présente dans l’identité sonore du tournoi. C’est tout cela qui a guidé notre création.

Vous évoquez de vrais instruments. Combien y a-t-il eu de musiciens pour les utiliser?
L’équipe créative qui est composée d’une dizaine de personnes aujourd’hui, dirigée par Vincent Turbé et Julien Goris ont eu un rôle fondamental. De même que l’équipe conseil et jusqu’au président de l’agence Michaël Boumendil. Nous sommes 25 à l’agence, nous avons presque tous travaillé sur ce projet-là.

Combien de temps a été nécessaire pour créer cette identité sonore?
Entre la première réunion et la «livraison», il s’est écoulé environ deux mois. Deux bons mois de travail, d’échange pour arriver fin prêt à ce que cette création soit perceptible notamment sur le court central à Roland-Garros durant le tournoi 2014.

Depuis 2014, cette identité sonore résonne au sein du stade mais aussi sur les supports digitaux du tournoi de Roland-Garros. Pourquoi avoir proposé différents formats sur différentes durées ?
Il y a différents formats en termes de durée mais aussi en matière d’intention. L’important est que le public puisse retrouver l’ADN musical du tournoi. En revanche la façon de s’adresser aux spectateurs, prêts à vivre des émotions avant, pendant et après les matchs n’est pas forcément la même que pour les internautes. L’idée était de ne pas appauvrir le vocabulaire de la marque Roland-Garros, mais au contraire de l’enrichir. C’est pour cela qu’il y a différentes versions. La durée est plus liée à une question d’ergonomie. La durée importe peu, ce qui est important, c’est l’intention et la mise en scène de la musique.

«C’était un rêve de travailler pour une marque comme celle de Roland-Garros et sur un sujet comme celui-ci»

Cette identité sonore va-t-elle évoluer, car cela fait déjà deux ans qu’elle est en place?
Elle a déjà évolué. Car lorsque cette identité sonore ne peut pas être utilisée de la même manière pour un spot TV, que lorsque le spectateur est dans le stade. Elle va continuer à évoluer. Le vocabulaire tonitruant et très épique de l’entrée des joueurs lors de la finale, n’est pas le même que celui dans les allées de Roland-Garros.

Au-delà de Roland-Garros, selon-vous quel est l’intérêt pour une marque d’acquérir une identité sonore personnelle?
Cela a plusieurs buts, l’un d’entre eux est de disposer d’un outil musical sur-mesure. La musique cela parle à tout le monde. La musique et le sport ont un point commun, c’est le fait de fédérer les gens. D’ailleurs, il y a beaucoup de concerts qui ont lieu dans des stades, et ce n’est pas pour rien. Il y a quelque chose de commun dans la passion déployée par le sport et la passion véhiculée par la musique. Aujourd’hui, un événement sportif c’est aussi une marque. Comme toute marque, elle doit pouvoir disposer des meilleurs outils pour sa communication avec l’opportunité en plus qu’ont ces événements d’avoir une salle, un stade… qui peuvent être une caisse de résonance incroyable pour nos travaux qui sont menés. Nous avons la chance de contribuer à cela pour la FFT.

Le fait que le tournoi de Roland-Garros se joue en extérieur a-t-il orienté aussi votre création?
Il y a eu au départ toute la dimension créative, puis par la suite il y a eu la partie implémentation et l’ergonomie des supports. Nous avons fait des tests sur le court central, sur le court Suzanne-Lenglen, avec des ingénieurs du son afin de régler quelques détails. Il faut que l’outil soit performant.

À titre personnel, quelle place occupe ce projet de création de l’identité sonore du tournoi de Roland-Garros?
Cela reste pour moi l’un des deux ou trois plus beaux sujets que j’ai pu traiter à l’agence. C’était un rêve de travailler pour une marque comme celle de Roland-Garros et sur un sujet comme celui-ci. Je suis un passionné de musique mais aussi de sport. Je rêvais de pouvoir travailler pour Roland-Garros, c’était et c’est toujours un plaisir, mais ce n’est pas juste le cas pour moi, c’est aussi le cas pour toute l’équipe de Sixième Son. Ce fut plus qu’un travail, ce fut un réel plaisir de pouvoir contribuer à l’image d’une marque comme celle-là, qui renvoie une image très positive de la France et de Paris à l’international. Il y a des projets comme cela qui tiennent plus à cœur que d’autres.

Propos recueillis par E-A