Novak Djokovic : «Cela permet de tout remettre à zéro»

Longtemps malmené et dépassé par les cadences et le jeu juste de Lorenzo Musetti, Novak Djokovic s’est fait peur lundi en huitièmes de finale. Le n°1 mondial, après une pause, alors qu’il était mené deux sets à zéro, a recollé au score avant de bénéficier de l’abandon de son adversaire (6-7[7], 6-7[2], 6-1, 6-0, 4-0 ab.).

Lorsque vous êtes mené 2 sets à 0, bien que vous soyez expérimenté, est-ce qu’un vent de panique a soufflé sur vous ?

Je me suis senti plus nerveux à l’entame du match, que quand j’étais mené 2-0. J’ai même apprécié le fait de perdre les premiers sets. Je ne sais pas, parce que je joue sous une certaine tension. Je n’arrivais pas à dérouler mon jeu. Il y avait trop de fautes directes. Je ne me sentais pas bien. Je ne jouais pas bien au début. Mais lui, et chapeau bas, il a très bien joué au début. Après, quand j’ai perdu le deuxième set, je suis sorti pour me changer. Je suis revenu sur le court, et je me suis senti différent. J’étais un tout autre joueur. Je me sentais mieux, dans mes frappes. J’avais plus confiance en moi. J’ai réduit le nombre d’erreurs. J’ai commencé à jouer comme je
devais jouer. Et, vers la fin du troisième, début du quatrième, je me suis rendu compte qu’il commençait à avoir des
difficultés physiques, ce qui m’a motivé davantage à exercer plus de pression sur lui, pour boucler le match
en ma faveur. C’est dommage pour un joueur de cette qualité, aussi jeune. Il mène 2-0 au début, dans son premier huitième de finale. Il n’a pas été en mesure physiquement de tenir le coup jusqu’au bout, et de se donner une chance de gagner le match, parce qu’au départ, il avait l’ascendant, indiscutablement.

C’est la 5 ème fois que vous réalisez une telle remontada en Grand Chelem. Lorsque vous aviez 18 ans, 19 ans, parfois, vous avez également des difficultés physiques. Vous avez abandonné, parfois. Pour être fort physiquement en 5 sets, faut-il avoir 24 ans, 25 ans ?

J’ai également eu des blessures, j’ai dû abandonner à quelques matchs de Grand Chelem, au début de ma carrière professionnelle. Ce n’est pas amusant. On souhaite l’expérimenter au début de sa carrière.
Mais, Musetti a gagné en 5 sets contre Cecchinato au dernier tour, donc ce n’est la première fois qu’il jouait en 5 sets. Et puis, il a réussi son match en 5 sets pour la première fois. Il y a un mélange d’émotion, d’excitation, de pression. Il ne sait pas comment il va se sentir jouer également sur le Chatrier pour la première fois, contre des grands joueurs. C’est une nouvelle expérience. Cela peut aller dans les deux sens. Cela peut vous donner un boost d’énergie et de force, parce que vous n’avez rien à perdre. Mais cela peut aussi vous ôter beaucoup, parce qu’en tant que jeune joueur, vous êtes encore en train de développer vos capacités émotionnellement, mentalement, à gérer cette pression, ces attentes qui pèsent sur vous, cette excitation. Il y a beaucoup d’énergie qui peut donc vous phagocyter complètement. Il faut l’expérimenter, en début de carrière, pour savoir comment le gérer les fois suivantes. Ce n’est pas quelque chose qu’on aime vivre quand on est jeune joueur, mais c’est la meilleure leçon que l’on puisse tirer pour l’avenir. Il a beaucoup de qualités dans son tennis, dans son jeu, sur terre battue
notamment, mais aussi sur d’autres surfaces. Il a tout pour être un Top Player. Il est gentil, on se connaît bien. On s’est entraîné bien des fois ensemble. Nous avons joué pour la première fois ici. Je lui souhaite le meilleur. S’il continue à poursuivre dans cette voie, je pense qu’il est vraiment sur le bon chemin pour devenir un grand, grand joueur. Quant à Berrettini, un autre Italien, je sais que vous serez ravis de voir le match. Il a un grand service, un grand coup droit, 2 armes importantes. Il est en grande forme. L’année dernière, il a fini sur un grand succès. Il a commencé cette année en battant Dominic Thiem en Australie, en jouant une très bonne ATP Cup. Il a atteint les finales avec l’Italie. Il a tellement de puissance de feu en lui, dans son jeu. Tu as écrit des amorties, oui, ses amorties sont très bonnes. Il est très agressif avec son gros service. Il a beaucoup de balles plus faciles qui vont au milieu du court, qu’il peut faire rentrer par un coup droit ou par une amortie. Il est très bon au filet. C’est un joueur du Top 10 et ce, depuis plusieurs années. Il est maintenant en quart de finale d’un Grand Chelem. Il faut être au meilleur de sa forme pour avoir une chance de le battre.

Votre coupure à la fin du deuxième set, à quel point était-ce important ? Qu’est-ce que vous avez fait ? Et comment avez-vous pu retrouver votre énergie et vous reconcentrer ?

J’ai dû me changer, notamment mes sous-vêtements, si vous avez besoin de savoir. Je n’ai pas utilisé les toilettes, si vous avez besoin de savoir. Donc dès que je me suis changé, je suis revenu sur le court. Et parfois, même si ce n’est que quelques minutes, d’avoir une coupure comme cela, du court, de quitter cet environnement, cela permet de tout remettre à zéro. Je l’ai expérimenté dans le passé, dans des situations similaires. On a le sentiment que c’est une pause très courte, mais le fait de quitter le court pendant quelques instants, cela fonctionne très bien, mentalement. Cela permet de respirer un bon coup, de revenir sur le court,et de retrouver du poil de la bête.

Propos recueillis par E-A