Seydina André, de Dakar à Cannes

Seydina André, de Dakar à Cannes

6 octobre 2021 Non Par SoTennis

C’est à Dakar, au Sénégal, que Seydina André a appris à jouer au tennis. Très vite, l’envie de tenter sa chance d’accéder au plus haut niveau s’est emparée de lui. Confronté aux limites, du moment, de son pays, c’est à Cannes, à l’Elite Tennis Center, qu’il poursuit, depuis décembre 2020, son apprentissage. À 18 ans et du haut de son mètre quatre-ving-dix-sept, le Sénégalais est actuellement en quête de ses, précieux, premiers points ATP.

Comment le tennis s’est invité dans votre vie à Dakar ?

J’ai commencé à jouer vers l’âge de 8, 9 ans à Dakar, au Sénégal, car mon père, qui avait pratiqué ce sport quelques années auparavant, avait à ce moment-là décidé de s’inscrire à nouveau dans un club et de reprendre le tennis. Un jour, il a décidé de nous emmener au club, à l’Olympique Club de Dakar, j’ai essayé de jouer et cela m’a tout de suite plu. J’ai débuté par l’école du tennis, tout en continuant à aller à l’école. Vers l’âge de 13, 14 ans, j’ai décidé que je voulais vraiment pratiquer ce sport. J’ai commencé à réellement m’entraîner à cet âge-là. J’ai rencontré un coach qui m’a appris à vraiment jouer au tennis, Damien Mangeot, un Français, qui s’était installé à Dakar. J’ai eu de la chance de tomber sur lui. J’avais réussi à m’entraîner, à l’Olympique Club de Dakar, trois à quatre fois par semaine. C’est à ce moment-là que j’ai voulu poursuivre dans cette voie et à 14 ans, j’ai commencé à poursuivre mes études par correspondance. Ensuite, vers 16, 17 ans, j’avais atteint un niveau qui faisait que je n’avais plus trop de joueurs avec qui m’entraîner. Je ne faisais pas trop de tournois. À Dakar, il doit y avoir sept tournois dans l’année. Il fallait voyager et venir, en France, en été, pour disputer des tournois. C’était un peu compliqué pour progresser. Mon entraîneur du moment était en contact avec l’Elite Tennis Center à Cannes (ndlr : fondé par Jean-René Lisnard, ancien 84e mondial). J’ai eu par la suite la chance de rencontrer Philippe Rome (ndlr : conseiller de l’Elite Tennis Center à Cannes), j’ai ainsi pu m’entraîner en décembre 2020, pendant un mois, à l’Elite Tennis Center. Le fait d’arriver dans un centre, où il y a beaucoup plus de joueurs, avec des niveaux dont je n’avais jamais rencontré, des joueurs professionnels, avec plus d’entraînement, du physique, cela m’a tout de suite plu. J’ai actuellement comme coach référent Alexandre Massa et je m’entraîne souvent avec Jean-René Lisnard.

Comment vivez-vous d’être séparé de vos proches ?

C’est clair qu’en arrivant à Cannes, le premier mois où je vivais seul, sans ma famille, mes amis, c’était un peu compliqué. Il fallu que je m’adapte, que je sois plus autonome, que je cuisine pour moi-même. Avant d’arriver à l’Elite Tennis Center, je n’avais presque jamais fait de physique. Au début, j’en ai fait beaucoup. J’ai essayé de tout bien faire. Mais comme j’étais très motivé, je me suis vite adapté à cette vie-là, à l’étranger.

Vous semblez être un joueur offensif, avec un revers à une main. À partir de quel moment avez-vous commencé à travailler votre identité de jeu ?

Avec Damien Mangeot, nous avions beaucoup travaillé le service, qui est devenu aujourd’hui ma plus grande arme. Nous avions également beaucoup travaillé sur mon coup droit, même si naturellement, j’avais une bonne élasticité du bras. Cela partait bien. J’aime venir à la volée, je ne cherche pas trop à jouer du fond parce que je sais qu’il y aura des joueurs qui seront plus forts dans cette filière. Mes deux grandes forces me permettent de monter au filet et comme je suis grand (1 m 97), j’arrive à bien couvrir le filet, donc j’essaie de monter à la volée très souvent.

Qu’elle est votre surface favorite ?

Naturellement, je suis plus à l’aise sur dur. Au Sénégal, je me suis entraîné sur des terrains sur dur qui étaient très rapides. Cet été, j’ai pu jouer sur terre battue et je trouve que cela a forgé un peu plus mon jeu, car il faut prendre plus de temps, créer ses points… Mais mon jeu convient plus naturellement au dur.

Travaillez-vous, aussi, l’aspect mental ?

Avec Damien Mangeot, nous avions beaucoup travaillé concernant mon attitude sur le court. Je continue de le faire à l’Elite Tennis Center, car je trouve que c’est quelque chose de très important qu’il ne faut pas oublier, car cela joue un rôle important sur notre jeu. Pour travailler cet aspect-là, je fais, entre autres, pas mal de yoga. Cela me permet de me poser, de me calmer et de me visualiser surtout.

En février dernier, vous êtes retourné à Dakar pour disputer un tournoi juniors ITF, que vous avez remporté. Qu’est-ce que cela vous a fait de refouler les terrains de l’Olympique Club de Dakar ?

J’étais arrivé avec un peu de pression parce que les gens attendaient beaucoup de moi. Car j’étais parti dans un nouveau centre, ils attendaient de voir le « Seydina qui avait progressé » et qui pouvait gagner. Je trouve que j’ai bien géré la pression. Le plus compliqué pour moi a été le premier match. Le fait de gagner ce tournoi ça m’a fait beaucoup de bien pour moi et pour mon club, là où j’ai appris à jouer au tennis. C’était une grande fierté de gagner ce tournoi ITF.

À court terme, quels sont vos objectifs ?

En mai, après deux tournois au Portugal, j’ai arrêté de disputer des ITF juiniors dont le but a été, pour s’aguerrir, de jouer des tournois adultes en France, l’été dernier. À court termes mon objectif et de pouvoir rentrer dans des Futures et prendre mes premiers points ATP, en Futures.

Lors de ces tournois Futures, il n’y a pas souvent de public, les dotations ne sont pas attractives. Lorsqu’on dispute ces tournois, la faim de remporter des points ATP et passer à autre chose est-elle la motivation principale ?

C’est ça ! J’ai très faim de victoires et de prendre mes premiers points ATP. En ce moment, je suis dans une bonne lancée et j’ai vraiment envie de gagner.

Cela reste cher d’accéder au plus haut niveau. Énormément de frais sont à régler pour poursuivre une progression. Avez-vous des soutiens financiers ? Le Fonds Roland Garros est-il l’un d’entre eux ?

Oui et tout cela se met en place et le Fonds Roland Garros cherche aussi des soutiens pour moi. J’ai un soutien financier d’un sponsor sénégalais, CSE, qui me file un peu d’argent pour ma saison. J’ai un contrat avec Babolat, pour mes raquettes, et avec le Coq Sportif, comme équipementier. C’est clair pour réaliser tous ces voyages, disputer des tournois, cela coûte de l’argent. En ce moment, c’est compliqué de trouver des sponsors. Mes parents n’ont pas forcément les moyens de payer tout cela, nous sommes en train de beaucoup chercher de sponsors pour m’aider à financer tout cela. Pour le Fonds Roland Garros, tout cela s’est fait grâce à mon ancien coach Damien Mangeot et Philippe Rome de l’Elite Tennis Center c’est un peu eux qui gèrent pour moi. Mais je vais, normalement, bientôt les rencontrer, fin octobre début novembre, à Dakar.

Propos recueillis par E-A lors d’un entretien téléphonique réalisé le 29 septembre 2021.