Gaël Monfils : «J’ai vécu un truc de dingue ce soir»

Gaël Monfils : «J’ai vécu un truc de dingue ce soir»

31 mai 2023 Non Par SoTennis

Gaël Monfils se qualifie pour le deuxième tour de Roland-Garros. Mercredi, au petit matin, le Français, mené 0-4 dans la dernière manche, est parvenu à s’imposer en cinq sets (3-6, 6-3, 7-5, 1-6, 7-5) face à Sebastian Baez. À 1h20 du matin, “La Monf”, avec le poignet gauche entouré d’une poche de glace, a livré ses impressions après son incroyable match.

Ce match, où le placez-vous dans votre carrière point de vue émotionnel et à d’autres niveaux aussi ?

Dans le Top 2. J’ai eu quasiment le même match contre CUEVAS il y a quelques années de ça, sur le court Lenglen. C’était incroyable comme atmosphère aussi. Mais celui-ci a un autre goût, je suis plus âgé. Et, peut-être que j’ai eu moins de chance de gagner ce match aujourd’hui. Donc, belle atmosphère ce soir. Et je crois que pour certains spectateurs aussi, j’ai vu que certains de mes amis sont venus pour la première fois à Roland-Garros, c’était une belle expérience pour eux.

Concernant votre physique, le match a été très dur. Bon, dans deux jours, est-ce que vous pensez que vous pourrez vous reprendre ? Que allez-vous donner ?

J’espère qu’effectivement, je vais pouvoir me reposer parce que je suis fatigué. Mais avec de l’entraînement… Et aussi, avec cette atmosphère, vous avez vu à la fin, j’ai eu des crampes, bien sûr… Il y a les nerfs, j’étais fatigué, mais c’est principalement les nerfs. Et je jouais à 100 % en adrénaline, grâce à l’adrénaline. Et puis, le public était là, il criait. Cela me donnait du peps, du punch. A un moment, je me suis dit “il va falloir payer le prix de tout ça”. Et j’ai dû tenir bon à la fin du match.
J’espère que la nuit sera bonne, ce soir et demain aussi. Là, je vais me reposer. Voilà, je serai prêt pour le match à venir !

Quand on gagne un match comme ça à Roland-Garros sur un premier tour, après ce scénario fou, c’est quoi votre premier sentiment finalement d’avoir vécu ça ce soir ?

En fait, tu oublies que c’est le premier tour. Tu te dis, tu as vécu un truc de dingue. C’est surtout ça, je me suis dit : « J’ai vécu un truc de dingue ce soir. » J’oublie où je suis. Se dire, j’ai réussi à gagner un match, au fond, je savais que cela allait être très, très dur. Je m’étais entraîné avec lui la semaine dernière, je le trouvais monstrueux. Quand j’ai vu le tableau, je n’étais pas très content. Je me suis dit : “Putain, ce n’est pas le game-play que je voulais pour jouer au premier tour.”
Et après, une fois que tu es dedans, tu acceptes finalement, tu acceptes, tu acceptes d’avoir réussi à trouver des solutions inespérées on va dire… Je suis juste très content ! Vraiment très content. Comme j’ai dit, c’est un des meilleurs matchs, un des meilleurs moments de sport que j’ai pu vivre.

Avant la balle de match, quand vous boitez et vous vous retournez pour faire quelques pas de danse et une petite grimace comique au public. Est-ce que ça veut dire : « OK les gars, je suis cuit, mais j’en rajoute un petit peu pour essayer de l’avoir et on va l’avoir ! » ?

Là, franchement, on peut dire qu’on fait du cinéma de temps en temps, mais là, franchement, j’ai mal ! (Rires.) Là, j’ai mal. Mais c’est là où on nous appelle sportifs de haut niveau. De temps en temps à l’entraînement, tu as réussi à pousser, tu as ces douleurs. J’ai des crampes assez hautes, c’est vraiment super haut dans le quadri. J’ai le gauche-droite, vers l’avant un peu moins, mais j’ai le gauche-droit. Je fais des grands pas, j’y arrive, des gauches-droites, mais l’amortie m’a fait très mal. Quand il fait l’amortie, je gagne le point. Je regarde Miky, je me dis : « Là, j’ai les 2, et ça va être compliqué ! » Là, je peux te dire, j’ai mal ! (Rires.)

C’est votre première victoire sur le circuit principal depuis votre retour. J’imagine que vous ne pouviez rêver mieux comme victoire pour revenir sur le circuit…

C’est sûr, quand je suis revenu sur le circuit, j’ai dit : « J’attends Roland-Garros, je gagnerai mon premier match, de toute façon, c’est sûr ! » Honnêtement, je ne m’attendais pas à gagner ce match. Ce n’est que du bonus, du positif. Mon but, c’est d’être en forme, justement pour tenir des matchs comme ça, d’une meilleure façon quand même, de pas avoir un gros drop, mais de pouvoir retenir des gros matchs comme ça, des matchs à tension, et ces semaines-là, j’ai bien travaillé. J’ai senti que même en perdant beaucoup de matchs dernièrement, j’ai pu enchaîner tournoi-entraînement, entraînement-tournoi, entraînement, entraînement… Ça m’a fait du bien. J’ai senti que j’ai repris confiance dans mon corps. Généralement, on se blesse et les gens oublient que la blessure, c’est le plus facile en fait. Mon pied, c’était plus facile à se remettre, parce que tu travailles, tu es vraiment présent sur le pied, après le reste, c’est l’appréhension, reprendre les appuis, renforcer les genoux, l’épaule, le bras… Tout ça, tu perds, tu perds énormément. C’est l’œil, c’est les bons choix, les bons moments, c’est se ressentir puissant. Et cette blessure, elle m’a fait un peu plus mal que d’habitude. Il y a deux choses que je n’ai pas pu faire, c’est que je n’ai pas pu courir. D’habitude, je me blesse un petit peu, j’ai toujours le côté physique qui me permet de faire pas mal d’activités en dehors : basket, paddle, tout le truc… Là, rien ! J’étais à l’arrêt total. Oui, à un certain âge, ça coince un petit peu quand même quand on recommence. Et ça, c’était la première fois. Il y a un truc, c’est la première fois, l’appréhension. Je me suis fait super mal à Montréal. Je me suis fait super mal. Honnêtement, le vrai premier match, malheureusement, le vrai premier match où je suis bien rentré dedans, c’était contre Ugo, 3 jeux. C’est le premier match où je me suis dit : « Je peux courir, vas-y, cours, vas-y ! Après, tu te fais mal, tu es là…! » Justement, j’avais plein de choses à régler, et tu vois, là, le match de la semaine dernière, à Lyon, il m’a fait beaucoup de bien, même perdu ! J’ai pu courir, j’ai pu courir sans cette appréhension, sans me dire : “Si je me décale en coup droit, ça va répéter…” On a toujours dans notre tête, forcément, quand on a une blessure plus importante, cette petite appréhension. Ça met du temps. Là je suis beaucoup mieux, et je suis content sur ça.

Propos recueillis par E-A à Roland-Garros