Nicolas Mahut: «C’est aussi important que des hommes puissent prendre la parole là-dessus»

Nicolas Mahut: «C’est aussi important que des hommes puissent prendre la parole là-dessus»

6 juillet 2022 Non Par SoTennis

Engagé sur le court, Nicolas Mahut l’est également en dehors. Avant de disputer son quart de finale du double au tournoi de Wimbledon, où il est associé à Edouard Roger-Vasselin, l’Angevin revient, entre autres, sur son récent engagement public envers la Fondation des femmes.

Votre partenaire habituel de double, Pierre-Hugues Herbert, a annoncé, via les réseaux sociaux, le 23 juin dernier, s’être blessé au genou. Avez-vous des nouvelles de lui ?

Évidemment, nous sommes en contact très régulièrement ensemble. J’étais dans le taxi m’emmenant vers  l’aéroport lorsque j’ai vu, sur mon téléphone, la vidéo de sa chute au moment où il s’est blessé. Rapidement, j’avais compris que cela être assez sérieux. Il devrait éviter l’opération ce qui est une bonne nouvelle, maintenant cela va être une période assez longue d’indisponibilité, au moins trois mois, je n’ai pas envie de parler pour lui, il communiquera lorsqu’il aura envie. C’est une blessure qui est assez sérieuse, mais il a peut-être évité le pire d’après ce que j’ai compris. Je sais qu’il est très courageux et qu’il prendra les choses étape par étape pour revenir. Je serai en tout cas à ses côtés pour le soutenir dans sa période de rééducation.

Le 23 mai dernier, vous êtes devenu membre d’honneur de la Fondation des femmes. Pourquoi être membre d’honneur de cette Fondation ?

Avec mon équipe, cela faisait un moment qu’on en parler. J’ai toujours été sensible à ce sujet-là, de par mon parcours personnel mon entourage proche ou moins proche, mais je ne savais pas de quelle manière agir. Ce qui m’a fait vraiment prendre conscience que je voulais vraiment m’engager un peu plus, c’est l’histoire avec Peng Shai. C’est un élément, un événement qui a déclenché quelque chose chez moi en me disant maintenant, il faut s’investir un peu plus. Lors du confinement, je sais aussi que cela a été très difficile pour beaucoup de femmes durant cette période-là. Cette cause-là, porté par des femmes, c’est aussi important que des hommes puissent prendre la parole là-dessus. Car ce n’est pas uniquement une histoire que de femmes. C’est important aussi que certains hommes, parfois, puissent être un « exemple » pour les jeunes générations », avec une prise de parole régulière. En parlant régulièrement – de ce sujet – j’espère pouvoir contribuer à faire bouger les choses.

On peut être un homme et féministe…

Oui, bien sûr ! C’est très important aussi d’insister sur le fait qu’il faut qu’il y ait une égalité, il faut lutter contre les violences faites aux femmes, mais il ne faut pas aller aussi dans l’excès. Par exemple, je ne suis pas favorable à ce qu’il y ait absolument une femme, à un poste stratégiquement, uniquement par son genre. Je veux que le choix se porte sur la compétence. Avec une égalité de salaire à compétence égale. Aujourd’hui, ce n’est, toujours, pas le cas. Pour la partie des violences à l’encontre des femmes, c’est aussi important d’éduquer les enfants, car ce sont eux les adultes de demain. Pour moi, ce volet-là est très important. J’essaie de le faire en tant que père. Pouvoir avoir une voix masculine au sein de cette Fondation, il me semblait que c’était important. J’en ai vu trop peu le faire. C’était aussi le bon moment pour moi.

L’égalité du prize money est une réalité en Grand Chelem. Pour le reste des tournois, ce n’est pas le cas. Cela vous inspire quoi ça ?

Les tournois individuels dépendent des sponsors… Nous avons malgré tout de la chance d’être dans un sport qui est « égalitaire » en comparaison à d’autres disciplines. Quand je vois la différence avec le foot qui est un sport majeur, il y a un très gros décalage. Je suis fier d’être dans un sport où l’écart des gains, hors Grand Chelem, se réduit de plus en plus.

Il y a quelques jours, sur son compte Instagram, Jelena Dokic a partagé certains aspects de sa vie privée, mais a aussi évoqué la santé mentale. Qu’en pensez-vous du fait que, désormais, certains athlètes parlent ouvertement de la santé mentale ?

C’est une bonne chose. Il faut comprendre aussi comment le joueur de tennis se construit. On part à un très jeune âge du foyer familial. Nous sommes dans un sport individuel où on ne s’épanche très peu, où on se livre très peu. On a toujours l’impression que si on se dévoile, on donne des failles et des opportunités aux autres d’en profiter. On prend tout sur nous. On se construit comme cela et à un moment donné, il y a un trop-plein. Je pense qu’il faut que, lorsqu’on est jeune, c’est d’avoir la possibilité très rapidement de s’exprimer sur les choses difficiles à vivre au quotidien et d’être entouré. Il y a toujours eu ce stress de la compétition, du classement, des attentes personnelles. Il y a désormais les réseaux sociaux qui rajoutent des choses, notamment pour la nouvelle génération. En tout cas, c’est bien qu’il y ait des joueuses et des joueurs qui s’expriment sur le sujet.

Nicolas Mahut, associé à Zhang Shuai, disputait aussi le double Mixte cette année à Wimbledon. / ©SoTennis

Concernant la nouvelle édition du tournoi féminin que vous organisez, l’Open P2i Angers Arena Loire (du 5 au 11 décembre 2022), est-ce que le plateau se dessine ?

Il est encore trop tôt pour évoquer le plateau. Pauline Parmentier est toujours l’ambassadrice du tournoi et je lui fais confiance pour avoir le plus beau plateau possible. Nous allons essayer de proposer le meilleur plateau possible, qu’il y ait un maximum de joueuses françaises qui viennent le jouer. Pour l’instant, nous aurons des qualifications plus réduites, 8 joueuses au lieu de 16, car nous n’avons pas pu nous mettre d’accord avec la FFT et les matches par équipes (qui se déroulent à la même période). Comme directeur de tournoi, cela me fait faire des économies, mais mon objectif reste de donner la possibilité à un maximum de joueuses françaises de jouer. Nous allons tenter, aussi, de proposer au public Angevin, plus d’animations, une exhibition en fin de semaine.

Propos recueillis par E-A à Wimbledon