Persona non grata

Persona non grata

6 janvier 2022 Non Par SoTennis

Novak Djokovic participera-t-il à l’Open d’Australie. Bloqué à Melbourne, dans un centre de quarantaine pour réfugiés de la ville, en attente de l’audience concernant l’invalidation de son visa et son exemption, le tenant du titre reste toujours, à ce jour, sous la menace d’une expulsion.

Novak Djokovic s’attendait à tout, sauf à ça. Celui qui avait entretenu le suspens quant à sa participation à l’édition 2022 de l’Open d’Australie, où il reste en quête d’un dixième titre à Melbourne et d’un 21e en Grand Chelem, avait agité le microcosme du monde du tennis en publiant sur les réseaux sociaux, le 4 janvier 2022, une photo de lui tout sourire sur le tarmac. “Je me dirige vers Down Under, avec une autorisation d’exemption”, avait-il écrit. Quelques mots, suffisants, pour allumer la mèche d’un retentissant pétard qui allait secouer bien au-delà de l’île continent. Très vite, se pose la question de l’obtention de cette dérogation à l’obligation vaccinale strictement encadrée (cinq cas possibles parmi lesquels une contamination au Covid-19 dans les six derniers mois, des effets secondaires à une première dose, ou un problème de santé important récent). Rapidement, les organisateurs assure que cette exemption a fait l’objet d’un “processus d’examen rigoureux impliquant deux panels indépendants d’experts médicaux”. Alors que Novak Djokovic, réticent à se faire vacciner, est toujours dans l’avion, l’annonce de cette venue avec cette exemption passe mal auprès des Australiens et des Melbourniens qui ont traversé, en 2021, 235 jours de confinement à cause du Covid-19.

Discret, face au secret médical qui entoure ce dossier, Craig Tiley, le directeur de l’Open d’Australie, amorce un remarquable exercice de contorsion. “Ce serait certainement utile que Novak explique les conditions dans lesquelles il a demandé et obtenu une exemption, déclare-t-il. Je l’encourage à parler de cela à la communauté. Nous avons traversé une période très difficile au cours des deux dernières années et j’apprécierais certaines réponses.”

Une affaire désormais politique

C’est au tour du Premier ministre australien Scott Morrison, visiblement très soucieux de l’opinion publique, surtout en période électorale, de rentrer en scène.”Nous attendons sa présentation et qu’il nous fournisse des preuves pour soutenir son exemption. Les règles sont les règles, et en particulier quand il s’agit des frontières, a martelé l’élu conservateur lors d’une conférence de presse. Si ces preuves sont insuffisantes, alors il ne sera pas traité différemment de qui que ce soit d’autre, et il retournera chez lui par le premier avion. Il n’y aura aucune règle spéciale pour Novak Djokovic. Pas la moindre.” Un peu plus de deux heures après son arrivée à l’aéroport de Melbourne Tullamarine, le 5 janvier, le n°1 mondial n’a toujours pas quitté l’enceinte. The Age, média australien, dévoile que le Serbe est bloqué à la douane pour un problème de visa. Ses équipes n’auraient pas effectué la bonne demande pour aller avec son exemption. L’information est confirmée par Jaala Pulford, membre du gouvernement de l’Etat de Victoria. La ministre de l’Emploi explique sur Twitter que l’Etat victorien ne fournira pas de visa au Serbe, comme le lui avait demandé l’Etat fédéral australien. Pulford, opposante politique du Premier ministre Scott Morrison, met en avant le fait que délivrer des visas est une compétence de l’Etat australien, pas de celui de Victoria. Le 6 janvier, le gouvernement fédéral, par la voix de son ministre de la Santé Greg Hunt, se montre ferme. Le visa du Serbe lui est retiré. Il n’est plus autorisé à rester sur le sol australien et va être expulsé au plus tôt. Il semblerait que sa rétention ne soit pas liée à un problème de visa, mais bien aux documents relatifs à son exemption médicale. “M.Djokovic n’a pas fourni les éléments appropriés pour entrer en Australie, confirme Home Affairs, le Ministère australien de l’immigration et de la citoyenneté. Les ressortissants étrangers qui ne disposent pas d’un visa valide ou dont le visa a été annulé seront placés en détention et expulsés d’Australie”. La crispation monte d’un cran lorsque le président serbe évoque un “mauvais traitement” de son compatriote. Après avoir immédiatement fait appel de la décision, Novak Djokovic reste enfermé avec les douanes australiennes sans savoir de quoi seront faites ses prochaines heures. La décision n’intervient qu’en fin de journée à Melbourne, le gouvernement explique que l’audience d’appel a été repoussée. Novak Djokovic peut donc séjourner en Australie jusqu’à celle-ci, prévue lundi à 10 heures, heure locale, à minuit dans la nuit de dimanche à lundi en France. Aleksander Vucic, président de la Serbie, évoque “une chasse politique” à l’encontre de son compatriote. Nole séjourne pour le moment dans un centre de quarantaine pour réfugiés de Melbourne, le Park Hotel, à la mauvaise réputation (sa demande de séjourner dans un appartement loué a été refusée). Un lieu devenu le nouvel épicentre de la ville, où ses fans commencent à se présenter devant le bâtiment afin d’apporter leur soutien à leur héros.

Son équipe a jusqu’à samedi pour apporter les preuves du bien-fondé de l’exemption et du visa qui lui a été retiré.

E-A