Roland-Garros, poursuit sa mise au vert

Roland-Garros, poursuit sa mise au vert

24 septembre 2020 Non Par SoTennis

Sorti de terre en 1928, le stade Roland-Garros a toujours été, comme aimait dire Gil de Kermadec, “un magnifique jardin”. Au fil des décennies et de ses successives vagues de travaux, le temple de la terre battue est parvenu, malgré tout, à préserver son charme vert. Marie-Christine Peltre-Brochard, Vice présidente en charge de la culture et du développement durable à la Fédération française de tennis, évoque la place du végétal au sein du nouveau Roland-Garros.

Le stade Roland-Garros s’apprête à entrer dans une nouvelle ère. Le 5 février dernier, la 11e et dernière aile du toit rétractable du court Philippe-Chatrier a été posée, avec un mois d’avance. Ce toit rétractable est le symbole du nouveau Roland-Garros. Comment définiriez-vous l’esprit de ce nouveau Roland-Garros ?

La livraison du court Philippe-Chatrier avec son toit (rétractable) opérationnel, est un acquis exceptionnel. C’est quelque chose de magnifique ! J’ai été fascinée par Michel Courajoud (paysagiste, concepteur du plan guide du nouveau Roland-Garros, décédé en 2014) qui avait eu l’idée de trouver un équilibre entre la nature et les infrastructures. Nous allons avoir 123 arbres de plus au sein du stade, des murs végétaux. Nous allons également avoir davantage de passerelles entre le stade et les jardins qui le bordent. Michel Courajoud disait toujours qu’il « fallait associer la beauté du sport à la beauté des plantes. » Le court Simonne-Mathieu, inauguré en 2019, en est un exemple. Ce court a été très critiqué par des personnes qui ne connaissaient pas le projet et qui ne voulaient pas le connaître. Aujourd’hui, les quatre serres de ce court, valorisent parfaitement les collections, qui ont été installées à l’intérieur et qui poussent à une vitesse folle. La destruction du court n°1 a également permis la création d’une esplanade, le jardin des Mousquetaires, de près d’un hectare, qui va être achevée en 2021. Durant le reste de l’année, après la fin, des travaux, ce jardin des Mousquetaires a pour vocation d’être ouvert au public sur le modèle d’un square parisien. Il y a là une volonté d’une interpénétration entre la ville et le stade. Nous souhaitons que le stade soit un élément de cette magnifique ville qu’est Paris. Avec Hugues Cavallin, le trésorier général, nous sommes en charge de cette thématique du stade à l’année et nous sommes très attentifs au fait, qu’entre l’espace muséal, l’ouverture de ce stade au public et à nos licenciés, que ces différents publics viennent à Roland comme si c’était chez eux. Dans la maison du tennis français.

Est-ce que c’est au sein de ce jardin des Mousquetaires, que les fameuses statues de Vito Tongiani (elles figuraient jusqu’en 2015 sur la place des Mousquetaires), seront replacées ?

L’achèvement total (du nouveau Roland-Garros) c’est 2021. Pour cette édition 2020, un habillage viendra masquer les travaux qui restent à réaliser à cet endroit. Notamment la nouvelle entrée du stade, qui se fera par l’avenue d’Auteuil et où figurera une statue, monumentale, en hommage à Roland Garros, rappelant ainsi cette incroyable histoire, qu’un aviateur a donné son nom à notre stade. Si nous n’avons pas pu le faire plus tôt, c’est que pour monter les ailes du toit rétractable du court Philippe-Chatrier, il fallait deux espaces de montage. Dont un a été à l’emplacement de ce jardin des Mousquetaires. Que le tournoi de Roland-Garros se déroule cette année est une exceptionnelle chance. En mars dernier, en raison de la pandémie liée à la Covid-19, on n’en mené pas large. Le pari que le président a lancé avec l’équipe du Comité Exécutif (comex), qu’il y a autour de lui, et de dire : « On fera Roland-Garros, on le déplacera ! » , au début, les gens n’ont pas trop compris, mais c’était la seule solution possible si on voulait défendre notre événement, qui est comme tous les Grands Chelems, un événement majeur. C’est très particulier et incroyable que cela tombe l’année du centenaire de la Fédération française de tennis. Quelque part, on aura quelque chose à raconter… Lorsque que l’édition 2020 va se terminer le 11 octobre, les travaux reprendront pour la finition complète. Nous sommes, à nouveau, dans une course effrénée… L’idée est effectivement de retrouver ces statues au sein de ce jardin dans une scénographie où les Mousquetaires (René Lacoste, Jacques Brugnon, Henri Cochet et Jean Borotra) joueront à nouveau ensemble.

Justement, concernant la statue monumentale à l’effigie de Roland Garros, avez-vous avancé à propos du choix de l’artiste en charge de réaliser cette statue ?

Ce qui a prévalu, avec le comité exécutif de la Fédération française de tennis, cela été plutôt de valoriser un jeune artiste de façon à être aussi dans ce qu’est Roland-Garros, la rampe de lancement des futurs grands du tennis. On a voulu, comme d’ailleurs avec l’affiche du tournoi de cette année, la retravailler dans un esprit de modernité. Nous travaillons désormais, pour cette affiche, avec la revue les Beaux Arts, avec comme souhait de mettre en évidence de jeunes talents. Je trouve que ce jeune artiste, Pierre Seinturier, qui célèbre les gens qui travaillent dans le stade et la végétation, c’est être en plein dans l’air du temps. Je pense que c’est important que nous soyons dans cet état d’esprit. On a voulu, comme d’ailleurs avec l’affiche du tournoi de cette année, la retravailler dans un esprit de modernité. Pour le moment, c’est un peu tôt pour révéler l’identité de cette jeune artiste en charge de cette statue monumentale de Roland Garros. On le fera certainement l’an prochain.

Le stade Roland-Garros a toujours été particulièrement végétalisé. Dans les années 1950, Gil de Kermadec aimait dire : « Le stade est un magnifique jardin » façonné par Arsène Le Goff le gardien et le jardinier, à l’époque, des lieux. En cette année, si singulière, y aura-t-il du changement, sur ce plan-là ?

Nous sommes très attachés à la végétalisation du stade. Il y a toujours eu dans l’histoire de ce stade un respect de la nature et de la mise en valeur de l’esthétisme. Toujours en fonction de l’avancement des travaux, en particulier des espaces qui pourraient sembler les plus bétonnés. Nous avons un jardinier-paysagiste, Laurent Villalongua, qui gère avec une équipe de jardiniers tout cet aspect-là. Ils font un travail extraordinaire, dans le respect de la biodiversité. Si nous avons un écrin au moment de Roland-Garros, c’est grâce à eux. L’an dernier, les travaux, notamment du court Central, n’étaient pas terminés et nous avions loué, comme depuis deux trois ans, beaucoup de plantes à bon nombre de pépinières d’Île de France, pour donner un aspect végétalisé à certains endroits du stade. Ce sera encore le cas cette année, afin de masquer ce qui est prévu d’être terminé l’an prochain. Je sais que Laurent et ses équipes sont opérationnels et que le stade sera très bien fleuri cette année, même s’il se déroule à l’automne. Avec des fleurs de saison, qui proviennent du stade et pour certaines qui seront louées. Nous produisons également des (petits) pots de miel offerts à nos invités. Nous avons eu d’ailleurs cette année une extraordinaire abondance de production de miel. Qui est extrêmement pur et bon. Le stade Roland-Garros doit être, aussi, un jardin. À nouveau, cela me fait repenser à ce que disait Michel Courajoud « je rêve d’un monde ouvert, d’une ville où les lieux de qualité s’offrent généreusement à leur voisinage ».

À propos du rosier Roland-Garros, où en êtes-vous?

Il existait, auparavant, un rosier Roland-Garros. Il n’en restait plus qu’un, au sein du stade, sauvé par Laurent Villalongua. Nous sommes en train de le remultiplier. La particularité, c’est qu’il est rouge. Mon idée serait de créer un rosier qui porterait des noms en rapport à l’extraordinaire histoire de notre stade. J’ai découvert que c’était un univers très compliqué. J’aimerais que l’on trouve un rosier à la couleur terre battue. Laurent continue son travail. C’est très compliqué de faire des cultivars. Nous avons des couleurs qui correspondraient bien, mais ces rosiers portent déjà des noms. Il est en train de continuer ces investigations, pour nous faire une proposition dans les prochains mois.

À la fin de l’édition 2018, le court Central avait été démoli à 80% pour être reconstruit dans un temps record. Avant sa démolition, est-ce que certains éléments ont été préservés ?

Il y avait déjà quasiment plus rien qui datait du Central de 1928. Grâce, notamment, à Gilles Jourdan, nous avons gardé quelques pièces symboliques, comme la croix de saint-andré. Notre stade, au fil des rénovations, n’avait déjà plus d’éléments d’origine. Sur le court n°1 nous avons, avant sa destruction, démonté tout le palmarès situé au sommet de ce court. Nous allons bien sûr garder toute une documentation iconographique de façon à raconter l’évolution de cette architecture. Il y a une photo dans le bureau du secrétaire général de la Fédération française de tennis où l’on voit le stade avec ses tribunes en bois. Notre stade va continuer d’évoluer, car il va être stade Olympique en 2024, avec la couverture amovible, légère, du court Suzanne-Lenglen qui accueillera les épreuves de boxe, qui le placera au même niveau d’équipement des autres tournois du Grand Chelem.

Propos recueillis par E-A lors d’entretiens téléphoniques le 10/02/20 et le 01/09/20