Les passeurs d’émotions (4/4)

19 décembre 2014 Non Par SoTennis

Tout au long de l’année grâce à leurs articles, leurs commentaires, leurs photos, ils font vivre le tennis. Tels des passeurs d’émotions, ils permettent aux lecteurs, aux auditeurs, aux téléspectateurs, de les accompagner le temps d’une conférence de presse d’après-match, où sous le halos d’une salle d’interview, ils arrivent à glaner les confessions des champions. Ou encore dans l’antre sombre d’une tribune, d’où ils suivent avec attention, toute la dramaturgie que la petite balle jaune peut offrir.

Christophe Saïdi photographe professionnel à la Fédération Française de Tennis, évoque avec passion son métier, et comment il arrive à travers son objectif, à capter les émotions du court.

Depuis quelques années vous êtes le photographe professionnel officiel au sein de la Fédération Française de Tennis. La photographie sportive c’était une vocation?
J’ai une formation assez atypique. Je suis passé par une école d’art graphique, tout en faisant en parallèle de la photo en amateur. Mais je ne me suis pas épanoui dans les arts graphiques, c’est alors que j’ai décidé de me lancer comme photographe professionnel. J’ai commencé à couvrir différents événements sportifs, tout en essayant de vendre mes photos, aux journaux, aux agences de presse. Progressivement je suis arrivé à vendre mes photos notamment à tennis info, le magazine de la Fédération Française de Tennis, puis de plus en plus. Un jour la FFT a décidé de créer un poste de photographe professionnel, et comme j’étais avec qui elle travaillait le plus, j’ai eu cette proposition de leur part, que j’ai accepté.

Tout au long de l’année vous couvez différents tournois, notamment celui de Roland-Garros, comment se déroule une journée type lors de cette compétition?
Ce tournoi nécessite tout d’abord la venue de photographes indépendants, afin de couvrir au mieux ce Majeur, qui est source d’une charge de travail importante. Durant la quinzaine, tôt le matin, une réunion est organisée afin d’évoquer quel photographe va couvrir quel court pour la journée. Une fois que les matches se concentrent uniquement sur le court central, ces réunions servent à définir les positions que nous allons occuper près du court, et les différentes rotations, afin de ne rien rater. Au cours de la journée il est possible de passer au centre de presse afin de décharger les cartes SD, afin que les photos soient mises en ligne sur le site Internet officiel du tournoi. Dans le cas contraire il est possible de faire appel à des « runner ». Ces personnes sont présentes dans le stade est sont en charge de venir chercher les cartes SD, afin de les ramener au centre de presse à l’équipe préposée, afin de les exploiter.

«À Roland-Garros entre 18h et 18h30, lorsque les journées sont ensoleillées c’est à ce moment que les lumières sont les plus belles»

Est-il important de bien connaître les lieux, les stades pour pouvoir obtenir des photos avec un rendu inédit?
À Roland-Garros entre 18h et 18h30 lorsque les journées sont ensoleillées c’est à ce moment que les lumières sont les plus belles. Sur le court central c’est à ce moment que les ombres commencent à apparaître sur le terrain. Il est souvent possible d’observer les joueurs entre ombre et lumière. Souvent les tonalités des couleurs y sont exceptionnelles. Afin de capter ces instants, j’affectionne la place dédiée aux photographes qui est située au-dessus de la tribune Lacoste, où sont placées notamment les cabines des commentateurs télé.

Selon vous qu’est-ce qui rend une photo de tennis réussie?
Tout d’abord l’émotion tient une place importante. Forcement lorsqu’un joueur remporte son match et qu’il se retourne vers son clan, en communiquant sa joie, c’est le moment le plus émouvant que l’on puisse trouver lors d’une journée de tournoi. Par la suite, il y a le côté « informatif », avoir les deux joueurs sur une même photo par exemple, afin de bien restituer le moment par rapport à la compétition. C’est aussi un aspect important. Les couleurs également vont rentrer en jeu, pour rendre une photo agréable à l’œil.

«Même si en 15 ans j’ai fait le tour du stade, l’envie reste intacte»

Pour vous quel est le joueur le plus expressif, est donc le plus plaisant à photographier?
Gaël Monfils est très expressif. Avec lui il y a toujours un truc en plus. Il y a toujours un saut, une expression, il va toujours réaliser quelque chose de différent que les autres ne font pas, et tout cela se retranscrit forcement à l’image. De plus il est très athlétique ce qui donne un plus à la photo, par rapport aux autres joueurs.

Avec le poids des boîtiers et des objectifs sur l’épaule et le dos, le corps doit «souffrir», effectuez-vous une préparation physique pour tenir bon?
Je fais du sport tout au long de l’année d’abord par plaisir, et pour garder également la forme. Il est vrai que le matériel d’aujourd’hui reste lourd, malgré les progrès technologiques. Pour les objectifs par exemple je suis passé d’un 400 mm à un 200-400 mm, et le gain de poids est évident. Mais les journées restent très physiques. Lors d’un tournoi il m’est déjà arrivé de perdre jusqu’à cinq kilos en trois semaines.

Avez-vous un rêve d’une photo, d’un reportage… à réaliser à propos d’une championne ou d’un champion en particulier?
Il y a encore un tas de choses dont j’ai encore envie de faire. En ce moment je suis en train par exemple de réaliser une série de portraits des collaborateurs de la FFT, afin de présenter les services dans le cadre d’une action que la Fédération Française de Tennis mène actuellement. Au quotidien j’ai presque autant de photos à faire en interne qui ne sont pas très médiatiques, mais sont très importantes pour nous, tout comme les clichés sur le court. Mais avant Roland-Garros, je réfléchis toujours par exemple aux nouveautés que je vais pouvoir apporter, et à de nouvelles idées, même si en 15 ans j’ai fait le tour du stade. Mais l’envie reste intacte.

Propos recueillis par E-A