Victoria Azarenka: «Cela m’a demandé dix ans pour passer à autre chose»

Victoria Azarenka: «Cela m’a demandé dix ans pour passer à autre chose»

24 janvier 2023 Non Par SoTennis

Victoria Azarenka s’est qualifiée pour les demi-finales de l’Open d’Australie. Mardi, l’ex-n°1 mondiale a battu l’Américaine Jessica Pegula, tête de série n°3, en deux sets (6-4, 6-1). Victorieuse à Melbourne il y a dix ans, la Biélorusse est revenue en conférence de presse sur son long cheminement pour être la joueuse qu’elle est aujourd’hui.

Il y a dix ans, vous aviez créé la polémique face à Sloane Stephens (elle avait demandé un temps mort médical et quitté le terrain alors qu’elle menait 6-1, 5-4 et venait de se faire breaker et avait avancé ensuite qu’elle avait été envahie par ses émotions). Qu’est-ce que la Vika d’aujourd’hui dirait à celle d’il y a dix ans ?

Mais est-ce que vous savez vraiment ce qui s’est passé il y a dix ans ? C’est un des pires moments que j’ai vécu. La façon dont on m’a traitée, la façon dont j’ai dû me justifier jusque tard dans la nuit parce que personne ne me croyait… En fait, ça me fait penser à ce que Novak a dit cette année à propos des doutes sur sa blessure. Je ne sais pas, mais j’ai l’impression qu’il y a cette volonté de créer une histoire avec un méchant et un gentil. Mais il n’y a pas de méchant ou de gentil, nous sommes juste des humains normaux qui traversent beaucoup de choses. Les présomptions, les jugements, tous ces commentaires, c’est de la merde car personne ne connaît l’histoire complète. Et peu importe le nombre de fois où je donnerai ma version, ça ne changera rien. Mais c’est marrant que vous évoquiez cela parce que cela m’a demandé dix ans pour passer à autre chose.

Vous évoquez des commentaires et des jugements. Comment les prenez-vous ?

On a dit que je trichais, que je faisais semblant, que j’essayais de faire perdre leur concentration à mes adversaires. C’est tellement n’importe quoi par rapport à mon vrai caractère. Mais il faudrait me connaître pour le savoir. J’ai tellement entendu de négatif que le doute a fini par s’installer. Mais maintenant, je m’en fiche. Je suis de plus en plus confiante en moi, je suis en paix avec ça. Tous les commentaires et jugements sont là, je le sais, mais je m’en fiche.

Vous avez confié par le passé que vous étiez anxieuse sur le court. Comment on s’en rend compte et comment on arrive à dépasser ce sentiment ?

En fait, on ne s’en rend pas compte tout de suite. C’est quelque chose qui grandit en vous et vous ne vous en rendez compte que quand c’est trop tard, quand plus rien n’a de sens. Alors vous vous sentez perdue. J’en étais arrivé au point où je ne trouvais plus rien de positif en ce qui me concernait. J’ai cassé quelques raquettes après mon match à Ostrava (sourire). C’était un moment difficile pour moi. Depuis, j’essaie de me simplifier la vie. J’ai commencé par essayer d’arrêter d’être positive, d’essayer juste de rester neutre. Il fallait que j’accepte cette anxiété, que j’accepte cette peur. J’ai travaillé dessus pour avancer pas à pas. Je fais en sorte de vraiment avancer étape par étape au lieu de tirer des conclusions hâtives. Ce n’est pas facile. C’est un travail quotidien. Mais je suis contente des résultats, je retrouve confiance en moi, je retrouve de la joie. Tout ça m’aide à être plus ouverte, plus compatissante. La compassion, c’était quelque chose que j’avais vraiment du mal à concevoir…

Quelle était la nature de cette peur ?

La peur d’échouer, essentiellement. De ne pas être capable de faire ce que je voulais. Inconsciemment, cela vous empêche justement d’accomplir ce que vous voulez. Je ne me sentais pas à l’aise et cela me faisait peur.

Désormais, qu’appréciez-vous le plus sur un court ?

D’être capable d’accepter ce qui se passe. Si je ne joue pas bien, je cherche une solution alors que dans le passé, j’aurais sûrement laissé la colère m’envahir. Et j’aime cette façon d’appréhender les choses, même si ça peut sembler cliché, même si j’ai déjà dû le dire avant. Mais je ne comprenais pas vraiment de quoi il s’agissait. Maintenant, oui!

Propos recueillis par E-A à Melbourne